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Réforme du bail à ferme en Flandre (novembre 2023)

La réforme du bail à ferme en Région wallonne est entrée en vigueur le 1er janvier 2020. La période de transition prévue était de cinq ans et court jusqu’au 31 décembre 2024. Il reste donc encore un an pour conformer aux nouvelles dispositions (voir l’article ailleurs sur ce site).

En Flandre, le processus de réforme a pris plus de temps mais le texte final du « Pachtdecreet » (Decreet van 13 oktober 2023 tot bepaling van de specifieke regels over de pacht --- Décret du 13 octobre 2023 établissant les règles spécifiques concernant le bail à ferme) vient d’être publié au Moniteur belge le 28 novembre 2023. La réforme, moins « révolutionnaire » que celle en Wallonie, s’applique aux baux à ferme en Région flamande.

Nous nous en limitons ici aux principes de base de cette réforme.

 

1. Application du Décret flamand

Rien de spectaculaire au niveau de l’application :

  • Bail de biens immeubles affectés principalement à l’exploitation agricole du preneur. (art. 4)
  • L’occupation de ces biens au moyen de la constitution d’usufruit entre vifs (durée déterminée) ou au moyen d’un droit d’emphytéose pour une durée inférieure à 27 ans. (art. 4)
  • Sont exclus de l’application (entre autres): la sylviculture, biens immeubles affectés à l’engraissement industriel et à l’élevage industriel, conventions d’une durée de moins d’un an, … (art. 5)

 

2. Le bail écrit devient la norme

Le bail par une convention constatée par écrit devient la norme. (art. 6, § 1er) Contrairement à ce qui a été imposé en Région wallonne, le bail oral reste possible, mais il faudra que les deux parties soient d’accord pour continuer dans cette veine : le bailleur et le preneur pourront contraindre l’autre partie à dresser, compléter ou signer une convention écrite « à tout moment », mais au moins 30 jours après une mise en demeure par envoi sécurisé. Cette option s’applique également aux baux existants. (art. 6)

En cas de litige à ce sujet :

  • Si le juge accueille la demande du preneur, le bail est renouvelé au profit du preneur (si cette sanction a été prévue dans la mise en demeure initiale)
  • Si le juge accueille la demande du bailler, le juge peut résilier le bail (à condition que cette sanction ait été prévue dans le dans la mise en demeure).

A concrètement parler, il est opportun de prendre en considération la formalisation par écrit de tout bail existant. Pour les baux écrits, un état des lieux est joint au dossier ; cette pièce constitue désormais une annexe obligatoire. (art. 7)

Le nouveau décret stipule qu’il n’est plus permis de payer le bail en nature ou en services.

 

3. Durée du bail

La période du bail reste à fixer librement mais doit être supérieure à neuf ans. Si une durée inférieure est stipulée, elle est de plein droit portée à neuf ans. À défaut de congé valable, le bail est prolongé de plein droit à l’expiration de la période d’occupation, par périodes successives de neuf ans (même si la première période d’occupation a duré plus de neuf ans). (art. 8) Pour l’exploitation de parcelles qui sont jointes à l’exploitation de parcelles plus importantes, le bail prend fin au même moment que bail principal. (art. 9) Insistons qu’il n’y a pas de limites quant au nombre de reconductions.

Quant à la résiliation, nous nous en limitons à signaler quelques éléments importants :

  • A part la résiliation par le bailleur possible pour donner aux biens loués une affectation conforme à leur destination finale (dans certaines circonstances) (art. 10), le bailleur peut résilier le bail à l’expiration de chaque période pour des motifs sérieux (art. 11).
  • La résiliation par le bailleur au cours des périodes successives n’est possible qu’à partir de la troisième période (18 ans) en vue d’exploiter lui-même le bien loué ou de céder l’exploitation à un ou plusieurs membres de la famille privilégié(s). (art. 12)
  • Dans le contexte des pouvoirs publics, une série de possibilités précises sont prévues, bien que dans un contexte souvent très particulier (à des fins concrètes d’intérêt général, par exemple pour la création de forêts ou d’espaces naturels). La possibilité de résiliation pour le boisement de zones vertes « à tout moment » est également prévue pour les particuliers.

Signalons aussi que le droit de préemption du preneur est maintenu. Par contre, il n’est plus possible de transférer ce droit à un tiers. Une exception à cette règle constitue « l’acheteur sûr » : si le bailleur a un acheteur déclarant par écrit au preneur que celui-ci peut continuer à louer aux mêmes conditions et que lui-même ne revendiquera pas le droit de bail pendant au moins 18 ans, le preneur bénéficie d’un droit de renouvellement de bail.

Pour le bail de longue durée (période d’au moins 27 ans), la résiliation par le bailleur est possible avec un délai d’au moins 3 ans et d’au maximum 4 ans et uniquement en vue d’une exploitation par lui-même ou d’un transfert à des membres de famille privilégiés.

 

4. Le bail de carrière et le bail « petit propriétaire »

Un bail de carrière est également possible, pour une période d’au moins 27 ans (le preneur ne peut pas être âgé de plus de 40 ans). (art. 12)

Signalons que pour les « petits propriétaires » il est désormais possible de conclure une seule fois une convention pour une période fixe de neuf ans minimum (art. 12), à condition que :

1° le bail ait été conclu par écrit ;

2° le bail concerne des terrains qui n’avaient pas encore été loués au moment de la conclusion de la convention ;

3° au moment de la conclusion de la convention, le bailleur soit titulaire d’un droit réel quelconque sur une ou plusieurs terres de culture qui ont une superficie globale de 1,5 hectare maximum ;

4° le bailleur ne soit pas une personne morale.

 

5. Le bailleur public…

Le bailleur public établit une procédure par laquelle tout candidat preneur peut faire une offre. (art. 24) Il détermine :

1° la procédure de location, en ce compris les modalités de dépôt des soumissions ;

2° les critères sur la base desquels le bail est attribué ;

3° les dispositions contractuelles relatives au bail.

Les règles, critères et dispositions contractuelles ne peuvent pas avoir trait au mode de culture.

La date limite de réception des soumissions est fixée à trente jours au moins à compter du lendemain de la publication de l'avis de mise en location dans le premier canal de diffusion accessible au public utilisé par le propriétaire public.

Le Gouvernement flamand détermine les informations minimales figurant dans l'avis de mise en location et mettra à disposition un modèle de bail (voir la section « sources »).

 

 

6. Bail et coefficients de fermage

Le montant du bail correspond (au maximum) au revenu cadastral non indexé du bien, multiplié par le coefficient fixé par la Commission flamande du prix de location.

Remarquons encore que pour ce qui concerne les coefficients de fermage, rien ne change en 2024, la Flandre ayant adopté un rythme trisannuel pour les indexer. Les montants fixés pour 2023 restent donc de vigueur pour 2024 et 2025. (art. 29; voir l'article ailleurs sur ce site)

Pour les baux établis par acte authentique, le fermage peut être augmenté (art. 30):

1° de 36 pour cent pour les terres et de 18 pour cent pour les bâtiments si la première période d'occupation est d'au moins 18 ans ;

2° de 42 pour cent pour les terres et de 21 pour cent pour les bâtiments si la première période d'occupation est d'au moins 21 ans ;

3° de 48 pour cent pour les terres et de 24 pour cent pour les bâtiments si la première période d'occupation est d'au moins 24 ans ;

4° de 50 pour cent pour les terres et de 25 pour cent pour les bâtiments si la première période d'occupation est d'au moins 25 ans.

Après la première période d’occupation, le fermage est ramené au calcul de base fixé à l’art. 29 du Décret. Pour le bail de carrière ce fermage fixé conformément peut être augmenté de 50% pour les terres et de 25% pour les bâtiments.

 

7. Entrée en vigueur

Le décret est entré en vigueur le 1er novembre 2023. Il s’applique également aux conventions conclues antérieurement à cette date et qui n’ont pas été dénoncées.

 

 

Sources :