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Clôturer le compte annuel à zéro?

La plupart des fabriques d’église clôturent leurs comptes annuels avec un boni confortable – ce qui est tout à fait logique, étant donné que, traditionnellement, le budget présente une certaine marge qui sert de tampon pour les éventuelles dépenses imprévues. Sans cette marge budgétaire, on risque de devoir recourir à une modification budgétaire dès qu’une dépense inattendue surgit. Mais est-il permis de clôturer le compte annuel à zéro ? Examinons la question de plus près…

 

Il n’y a aucun obstacle de principe pour clôturer le compte annuel avec un boni près de zéro, bien qu’il faille que certaines conditions soient remplies pour y arriver. Avant tout, le trésorier est tenu de toujours respecter les principes de la comptabilité, à savoir le respect du budget, la légitimité des dépenses, l’annalité de la comptabilité, … Il n’est pas évident de clôturer à zéro tout en respectant ces principes. Pourtant, pour certaines fabriques c’est assez facile d’y arriver sans le moindre abus. Pourquoi ? Le budget détermine tout.

Dans le budget il y a deux types de montants : les « vraies » prévisions budgétaires (pour les recettes et les dépenses qui seront réalisées en cours d’exercice), d’une part, et le résultat présumé, de l’autre. Ce sont ces deux éléments qui détermineront la flexibilité du budget et la possibilité d’avoir un petit boni en fin d’exercice ou pas.

 

Premier élément : le résultat présumé

Commençons par le résultat présumé. Son calcul est déterminé par le boni du dernier compte approuvé (pour le budget de 2025, c’est le résultat présumé de 2024 qui est pris en compte, sur base du boni du compte 2023 moins le résultat présumé repris dans le budget 2024 même). Sans trop compliquer les choses (sinon, vous pouvez consulter l’article ailleurs sur ce site), il faut retenir que ce résultat présumé augmentera si le boni augmente d’année en année, et qu’il diminuera, si le boni du compte annuel diminue également.

Avant de continuer, soulignons que notre analyse se limite à la situation « normale » des fabriques d’église qui recourent à un supplément communal ordinaire et que le boni dont on parle est à affecter au service ordinaire (donc sans subsides ou autres financements extraordinaires).

Le boni du compte annuel de 2024 augmentera en fonction de l’évolution du boni entre 2022 et 2023. Si le boni de 2022 était de 2.000 euros et celui de 2023 était de 7.500 euros, le boni de 2024 sera normalement plus élevé et augmentera de 5.500 euros, car l’augmentation du boni pour l’exercice 2023 ne sera prise en compte que via le budget de 2025 (où le boni gonflé de 2023 sera compensé par une diminution du supplément ordinaire). Bien entendu, on n’y peut plus rien, mais en vérifiant l’évolution de votre boni, vous aurez une bonne idée de l’impact sur le nouveau compte annuel. L’exception à cette règle se situe d’ailleurs dans les cas où les résultats présumés fluctuent historiquement.

Si le boni diminue entre 2022 et 2023, il est très probable (si le résultat présumé était stable) que pour 2024, on aura également un boni qui diminue.

Bref, l’évolution du boni entre les deux derniers exercices, aura son impact sur le compte en cours, car cette évolution n’a pas encore été prise en compte au niveau d’un budget.

Soulignons encore qu’il n’est pas permis d’utiliser en 2024 cet accroissement du boni réalisé en 2023, car on est limité aux prévisions budgétaires prévues en dépenses…

 

Deuxième élément : les « vraies » recettes et dépenses

Pour les « vraies » recettes et dépenses, c’est la marge budgétaire qui jouera et déterminera directement l’importance du boni. On sait que traditionnellement on sous-estime les recettes ordinaires (sans compter le supplément ordinaire, qui est calculé - et versé - sur base d’un calcul bien cohérent) tandis que pour les dépenses ordinaires, on surestime. Très peu de fabriques réalisent leur budget à l’euro près. Au contraire. Et c’est là que se situe la difficulté.

Si, au niveau des recettes, on planifie, par exemple, 9.000 euros au lieu des 10.000 euros perçus dans le dernier compte annuel (sans compter le supplément ordinaire), on crée une marge budgétaire de 1.000 euros. Si, du côté des dépenses, on augmente en même temps les prévisions par rapport aux montants réalisés au niveau du compte 2023, par exemple 11.500 euros par rapport au 10.000 euros réalisés, on aura encore une marge de 1.500 euros, bref 2.500 euros au total.

L’avantage de cette marge est double : on évite un budget trop serré, qui mènerait vite à une modification budgétaire et, deuxième avantage, le supplément ordinaire prend un peu d’avance sur les dépenses et crée une marge au niveau des liquidités (dans la mesure où on paie suivant un timing convenable).

La marge budgétaire est « utile » mais, clairement, ne déclenche pas une accélération des dépenses, normalement. Pour la plupart des fabriques, cette marge est d’ailleurs assez stable, considérée sur plusieurs années. Si, soudainement, la marge budgétaire est utilisée en réalité pour dépenser plus, on aura un boni moins élevé : c’est le cas typique d’un gros entretien inattendu qu’on glisse dans le service ordinaire. Disons, pour continuer l’exemple ci-dessus, que cette dépense est de 1.250 euros, la moitié de la marge budgétaire aura été utilisée. Si, par contre, la marge budgétaire n’est pas utilisée, le boni restera plus ou moins au même niveau d’année en année (si du côté des recettes on exécute également comme prévu).

Revenons à notre question initiale du petit boni au compte annuel. Les fabriques qui choisissent de limiter la marge budgétaire, auront traditionnellement un boni moins élevé, car les prévisions budgétaires ressemblent tout à fait aux montants réalisés au compte annuel – même un peu trop, pourrait-on dire. Si, en même temps, le boni de l’exercice précédent était également modeste, on aura un boni très peu élevé, ou même proche de zéro.

Le compte qui présente un résultat si modeste pourrait paraître suspect, mais il est vraisemblable que c’est à cause d’un budget (trop) serré plutôt que par des manœuvres en cours d’exercice, surtout si le boni est peu élevé depuis des années…

 

La fabrique d’église ne « gagne » rien

Le trésorier fera donc attention aux évolutions des comptes historiques (bien entendu, on n’y peut plus rien sauf anticiper dans le prochain budget) mais surtout à la marge budgétaire à proprement parler.

Soulignons que dans toutes les situations évoquées, la fabrique ne « gagne » rien :

  • Si elle utilise la marge budgétaire « traditionnelle », le boni diminuera, ce qui augmentera le supplément ordinaire deux ans plus tard ; ensuite, la fabrique d’église retombera sur sa marge traditionnelle ou l’augmentera, par exemple parce que les dépenses augmentent structurellement (et on veut maintenir la marge pour une gestion pragmatique) ; finalement, c’est la légitimité des dépenses envisagées qui détermine tout et que la fabrique d’église justifiera au moment de la confection de son budget.
  • Si la fabrique d’église n’utilise pas la marge budgétaire, le boni restera plus ou moins au même niveau. Le résultat présumé dans le nouveau budget restera également stable. La fabrique d’église pourra adapter la marge budgétaire si nécessaire.
  • S’il y a très peu de marge budgétaire, la fabrique risque de devoir recourir à une modification budgétaire assez vite. Bien entendu, la marge budgétaire reflète souvent les risques éprouvés antérieurement et va de pair avec l’impact budgétaire global. Pour les petites fabriques ou celles qui ont un édifice affecté au culte sans trop de charges, on constatera la différence. Les grosses fabriques, par contre, auront normalement besoin de plus de marge pour garantir l’effet tampon au cas où…